du soleil, l’épi de blé cueilli avant sa maturité et mis à macérer avec des muscades, enfin les truffes, le royal empoisonnement des bonnes chères. Au courant du mois de septembre, toutes les tables se garnissaient de la dépouille des angéliques. Ici elles se figeaient dans le sucre candi, là elles infusaient dans le rhum avec des graines de coriandre et d’anis. Partout on voyait s’allonger, comme des tronçons d’un même serpent, les côtes énormes, d’un beau vert mort, prêt à renaître vert lumière sous une addition d’alun et de fleurs de violettes. Madame Lordès n’employait pas encore l’arsenic pour obtenir un vert métallique, mais cela lui arriverait un jour, du train où allaient les assaisonnements dans cette maison.
La conversation des époux se traînait du dernier moyen de confire sans dénaturer la fermeté de la plante au besoin qu’on éprouvait de stimuler ses digestions. M. Lordès — les clients, si rares, éloignés — se rendait à un certain placard, situé dans une chambre hermétiquement close, sans meubles, lirait des bocaux, des entonnoirs de cristal, du papier Joseph, et compulsait de vieux manuscrits prêtés par le curé d’Estérac.
Laure assistait aux multiples édulcorations, trempait ses doigts, suçait un morceau de cannelle qu’on jetait une fois le sirop passé. La gourmandise se développait en elle comme une religion. Le mystère de cette chambre, les dalles de la cuisine qui avaient des rapports avec celles de l’église, le