Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/177

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— Tu comprends, ma cocotte en sucre, je ne te paie pas, mais tu feras de l’or avec les mariniers qui viennent boire chez moi, les bracos qui me fournissent du gibier… et je serai la mère.

Ça durait depuis cinq ans. Ida en avait vingt. Un jour, un garçon ruisselant d’eau, un noyé, était entré dans la baraque demandant du secours. Il avait reçu un coup de feu dans la cuisse et il avait nagé, traversé la Seine au hasard, tenant la bretelle de son fusil entre les dents. C’était Simon-le-Braco. On l’avait accueilli comme l’enfant de la maison.

— On est tous du même bateau ! prétendait le père Olibert qui se faisait vieux et rêvait d’un jeune associé.

La mère Fonteau ayant amalgamé des simples dans un gobelet d’eau-de-vie, lui posa un magique emplâtre sur sa blessure, mais elle accompagna ses soins judicieux de gestes si particuliers que le braconnier, un peu délicat, lui dit, très rudement :

— Pour le surplus, la mère, passez-moi donc votre fille !

Il ne savait pas que sa plaisanterie serait prise au sérieux,