Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/33

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garer même une bicyclette. Désolés, Monsieur et Madame. C’est à peine si nous pourrions vous faire déjeuner !… »

Partout, l’affluence des étrangers, après ces grandes tourmentes de l’époque de la grande guerre, avait jeté les uns sur les autres bien des humains également désemparés, pour des raisons peut-être supérieures à celle d’une nuit d’amour sacrifiée à la réparation, en cours de route, d’un moteur facétieux.

Céline tombait de sommeil et n’osait pas l’avouer. Julien avait une soif démoniaque et n’osait pas trop boire des alcools remontants devant cette petite fille en blanc élevée à l’eau pure, déjà, hélas ! si abominablement marquée de noir par la main… du destin. Ils étaient d’ailleurs ivres, tous les deux, de la plus détestable des ivresses : celle du mauvais vouloir, et même ne voulaient plus que se faire du mal.

Leur voiture, errant d’hôtel en hôtel, fendait la foule de son énorme museau sombre qui semblait happer des gens au passage et, chose vraiment inouïe, n’écrasait personne malgré les vociférations en tous les idiomes. Cette foule était celle des Babels où l’on se réunit