Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/54

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

d’un être inexistant qu’elle avait cru reconnaître pour l’avoir entrevu dans ses rêves. Son chevalier ! Le beau ténébreux !… Et il s’éloignait, il la quittait, il la fuyait, après lui avoir proposé de fuir ensemble. Ah ! le grand danger d’amour qu’elle venait de courir…

Comment fit-elle pour ne pas s’évanouir quand arriva l’heure de partir à son tour ? Elle n’obéit pas à ce qu’il lui avait dit, avant le mari ; serrez bien votre manteau pour que personne ne puisse soupçonner que j’enlève une jeune mariée ! À quoi bon, maintenant ? Cet inconnu, dont elle ne saurait jamais le nom, reculait devant l’audace du crime prévu par les lois et il la laissait en présence du meurtre de son amour naissant que son maître légitime accomplirait sans même s’en douter. Un bel amour qui aurait eu des ailes pour s’envoler… Les hommes sont donc si lâches devant l’aventure, la seule chose qui compte dans la vie !

Elle songeait intensément à l’eau, l’eau boueuse des grands bassins… et le soir tombait.

— Allons, Linette, en route, ma petite fille, l’air devient plus respirable. Sauvons-nous de