Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/72

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moment, un cygne voguait dans un rayon de lune, doux et triste comme l’écharpe d’Ophélie.

Céline était assise sur l’entassement des coussins, dans le divan, et elle paraissait aussi blanche que le cygne de ce paysage lunaire. Elle parlait de sa voix tremblante d’enfant effrayée, mais on devinait le ravissement de tout son être à l’exaltation passagère de cette voix, qui, tout d’un coup, devenait vibrante, d’une vibration de métal, ou ténue, filée, d’un son de verre qui se brise.

Il était à genoux devant elle, le front appuyé sur son poing fermé, la contemplant, immobile. Il formait, sur le tapis de nuances pâles, semé de roses, le tassement d’ombre d’un corps d’animal prêt à se détendre, à bondir sur une proie, mais il écoutait avec une ferveur de dilettante tout ce qu’elle racontait absolument comme on écoute le chant d’un oiseau sauvage qu’on craint de déranger dans le débit de son morceau par un geste inopportun.

— L’amour, si j’ai bien compris, murmura-t-il, c’est pour vous la confiance absolue en celui qui vous plaît ! Cela ne dépasse pas la permission de… minuit ? Et, ensuite, chacun rentre chez soi pour y dormir du sommeil de