Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/73

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l’innocence. Ça n’a rien d’excessif. Cependant, vous me préférez à votre mari parce que je vous ai proposé de le tuer… bien avant de l’avoir vu. Arrangez ça ! Lina, je crois que nous nous entendrons difficilement sur le chapitre des convenances. Vous allez me refuser ce que vous serez forcée d’offrir à l’autre, cette brute… sinon appartenir aux deux. Il est on ne peut plus stupide de rester chaste. Voici une heure que nous perdons à l’escrime de l’esprit. Pas un cri de faiblesse ne vous échappe, pas une sensualité naturelle en surgit, mais vous aimez le mot : amour, que vous savourez comme un bonbon. Il contient une liqueur qui vous enivre à vous toute seule. Il est singulier de constater que vous ne connaissez pas la loi de volupté et que vous seriez peut-être… une très bonne mère de famille, petite fille orgueilleuse et froide malgré la farouche indépendance de votre caractère. Penchez-vous sur moi et regardez-moi dans les yeux. Ah ! nous avons le temps… Le marchand de sable n’a pas encore passé. Je vous devine forte comme la mort de toute espérance… mais j’ai résolu de vous donner l’amour tel que vous le concevez.