Page:Rachilde - L’heure sexuelle, 1900.djvu/134

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Elle me regarde en dessous, les lèvres serrées, les prunelles sombres.

On sent que pèsent sur elle toutes les terreurs inconscientes qu’on entretient chez ces malheureuses : lois des concierges, de la police, toutes les tyrannies d’une société fière de sa pudeur et qui ne daigne que les tolérer.

Ou elle a souvenance de quelques tortures inouïes subies de bonne volonté en une de ses nuits louches de levages d’ivrognes.

Ils ne sont pas tous gris d’un rêve de poète, les ivrognes.

— Reine, est-ce que tu ne désirerais pas faire un autre métier ?

J’ai l’air du médecin qui propose l’Italie au poitrinaire pauvre.

— Moi ? je sais rien fiche… et je veux rien fiche. Je suis sur le tas… faut que j’y reste. (Elle ajoute farouche :) Je suis paresseuse, tu sais.

Il y a quelque chose de lourd sur les épaules de cette fille, de plus lourd… Elle a une raison pour se réserver ainsi devant un homme qu’elle pourrait si facilement exploiter.