Page:Rachilde - L’heure sexuelle, 1900.djvu/278

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samment pour établir des comparaisons humiliantes.

 

Il est minuit. Je ne dors pas. Je suis dans mon lit comme le prisonnier qui attend un arrêt.

Elle est fâchée.

Elle n’a pas voulu de mes baisers, ce soir, avant de tirer son verrou. Elle a dû souffrir, peut-être cruellement.

Comme c’est une sorte de créature végétant au lieu de vivre, un animal qui serait une fleur (oh ! une fleur très vénéneuse), elle ne peut pas se plaindre, elle ne sait pas se plaindre.

Elle est la mystérieuse idole portant, brodé sur ses voiles, l’emblème de l’Éros captif, le phallus enchaîné à la terre Isis. Elle est l’abominable charmeuse qui ne peut se soustraire elle-même au charme maudit, et il faut qu’on la désenchante.

Puis-je la désenchanter ?

Pauvre Don Juan sans force, presque sans croyance. Je n’ai plus ma belle confiance de jadis. Je ne suis plus César, et j’ai perdu la bataille.