Page:Rachilde - L’heure sexuelle, 1900.djvu/279

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J’ai voulu trop aimer, je me suis grisé de mon amour, et mes pas sont incertains. Je touche à une précoce vieillesse ; J’ai souffert, j’ai heurté la mort. Il n’y a rien de plus anéantissant que cette pensée qu’on ne plaît pas, et je me découvre tous les défauts physiques, je crois que je suis laid, vieux ou usé, maussade, railleur. Elle déteste mes plaisanteries.

Comment est le tigre, lui ?

Il est, simplement.

Moi, je ne suis pas.

J’ai cessé d’être le jour où, devant cette fille, la réalité, j’ai choisi le rêve.

J’ai désiré cette épreuve, je suis récompensé de ma patience, puisque je me dégage peu à peu du lien charnel ; mais je suis puni parce qu’elle s’éloigne de plus en plus de ma chair.

Ah ! si j’avais su !… Comme j’aurais joyeusement partagé la misère et les hontes de son sexe.

Je n’ai pas eu le courage d’aimer, d’abord.

On ne peut plus aimer après.

Une heure existe, durant quelle heure il ne faut pas contrarier les destins.