Page:Rachilde - L’heure sexuelle, 1900.djvu/99

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qu’en laissant sonner l’heure à sa pendule. Enfin, nous sommes entre hommes et je serai plus franc : j’ai le malheur d’avoir épousé une petite femme qui n’a pas de sens, et, par-dessus le marché, cette petite femme-là a eu le malheur de lire un livre de vous où vous parliez de deux amoureux qui voulaient rester purs. Ça lui a tourné, monté l’imagination, elle n’a pas du tout deviné que vous vouliez parler d’autre chose et ce n’est fichtre pas moi qui lui ai fourni des détails. J’ai fort bien suivi son raisonnement, son état d’âme, comme vous dites, les gens de lettres. On n’est pas très bête quand on aime beaucoup sa femme et on l’écoute causer, sans en avoir l’air. Elle a cru que l’amour pur, l’amour de tête selon votre expression, existait, et elle vous a supposé capable, à cause de votre allure de beau chevalier, de ce tour de force. Ne vous a-t-elle pas fait des tirades là-dessus devant moi, un soir, au dessert ? Ne niez pas. J’ai compris. Vous avez répondu par des plaisanteries, puis, à partir de ce soir-là, vous vous êtes espacé… car vous êtes un honnête garçon ; de plus, vous n’êtes pas libre. Ce n’est un mystère pour personne que