Page:Rachilde - La Découverte de l’Amérique, 1919.djvu/107

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donne beaucoup de mal, il faut me baisser des heures entières, brandir un sécateur, arme dangereuse ! Enfin, nous sommes là chez nous mieux qu’au salon et on ne nous inquiète pas par de malsaines curiosités. Les grilles, sur la rue, sont garnies de tôles jusqu’à la hauteur de la couronne comtale qui timbre notre porte cochère, et quand le notaire vient pour mes petites rentes, il ne tire même pas le cordon de la sonnette ; il met ça dans la boîte aux lettres parce qu’elle ressemble à un coffre-fort. Nous ne recevons aucun journal. Personne, hélas, ne m’écrit. L’hiver, on se calfeutre. J’ai posé moi-même des bourrelets aux portes principales et la neige les double à l’extérieur. On entrebâille seulement le guichet pour le pain. Nous possédons, Dieu merci, de quoi vivre sur nous : poulets, lapins (j’ai horreur de la viande rouge), conserves de porcs et de légumes, de bonnes confitures… Ah ! Monsieur, c’est… c’était le paradis !