Page:Rachilde - La Découverte de l’Amérique, 1919.djvu/90

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énorme, reposant sur une croupe énorme, une croupe de lionne ou de monstre marin. Ses cheveux ou ses voiles blancs largement éployés l’entouraient d’une auréole soyeuse. On eût cru distinguer le brouillard de l’aube. La dame balançait une figure blafarde, d’un ovale très long, trouée de deux trous noirs phosphorescents derrière lesquels tout le mystère de cette nuit sinistre vous guettait. La tête se baissait et se relevait, semblant compter la mesure de son effroyable vacarme. Un beau chant de mort. Cela réunissait le bruit du vent qui souffle la tempête, celui de la mer qui se lamente après le naufrage, le braiement ironique des ânes et les éclats des trompettes guerrières. Des sons filaient tout à coup en sanglots éperdus, pleurs de jeunes filles nerveuses qu’on torture, se brisaient en hoquets d’hystériques, refilaient en chant de sirène pour monter jusqu’au brutal hennissement…

— Ou nous sommes tous morts, ou