Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/197

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m’arrivait naturellement, les choses drôles. Et cela s’enchaînait si mal ! C’était absolument comme lorsqu’on préparait une confession générale au couvent, nous ne manquions jamais de nous rappeler… ce que nous ne voulions pas dire ! Les histoires trop personnelles, par exemple : que nous avions bu l’huile de la lampe du Sacré-Cœur, car nous avions toujours faim chez ces religieuses, et nous faisions couler l’huile à brûler sur nos vieux croûtons. Ou bien que nous étions allées dans un certain endroit pour lire les morceaux des journaux pendus au clou, ce qui était fort dangereux, des morceaux de feuilletons. Et puis, je pensais, à cause de la figure abîmée de mon mari, à notre aumônier, le père Duplantain, qui possédait douze doigts de pieds, une légende très connue parmi nous, mais tu comprends que personne n’y était allé voir ! Je pensais… je pensais… Je ne pouvais cependant point écrire tout cela ! Je me rappelais aussi les belles phrases des cantiques, et des larmes de plaisir me venaient aux cils sans aucun mot bon à dessiner sur du papier vert pâle. Mon Dieu ! Une lettre d’amour ? Comme c’est difficile à faire, et je devais lui adresser une belle lettre, il m’avait dit : « Mon Éliante, tu m’écriras… une belle lettre, pleine de baisers, tu m’écriras tout ce que tu ne veux pas me dire