Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/60

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Mary se releva, elle courut au grand collégien qui criait au massacre sans se déranger.

— Monsieur, il veut tuer mon mouton ; et elle contenait ses larmes.

Mademoiselle d’Apreville vint s’informer de la chose.

— Bah ! fit-elle, tant pis pour toi… Est-ce qu’une fille de militaire pleure pour ça ! Fallait le défendre au lieu de lui laisser casser la patte… Tiens ! voilà qu’il faut l’emporter.

En effet, on emportait le mouton dont le membre démis pendait lamentablement.

— Pauvre Mimi ! soupira le collégien en caressant les nattes flottantes de Mary interdite.

Mais tout d’un coup une révolution s’opéra dans la passivité de la petite colonelle ; un cri rauque, un cri de chatte en colère sortit de sa gorge crispée ; elle rejoignit Paul Marescut d’un seul bond et, tombant sur lui à l’improviste, elle le cribla d’égratignures.

Elle venait de déclarer sa première guerre au mâle.

On fut obligé de lui arracher ce garçon complètement défiguré.

— L’horrible petite créature ! bégayait Jane d’Apreville, expliquant à son père que ce devait être un sale colonel que le colonel Barbe, puisqu’il élevait si mal ses enfants.

La journée s’acheva par un quadrille dans lequel le général, un peu ivre de cette jeunesse qui lui