Page:Rachilde - La Tour d’amour, 1916.djvu/23

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C’est comme un courant se brisant sur des piles de pont, seulement il n’y a pas de pont, et il faut veiller au moindre choc comme si on était sur un bateau de verre.

On me héla par le porte-voix.

Je grimpai et je me trouvai devant… ma maison de retraite.

À pic, par le travers du Saint-Christophe, s’élevait le phare d’Ar-Men, tout entouré des crachats de l’Océan. Les vagues se révolutionnaient à sa base en hurlant et bavant avec la bonne envie de le démolir. Jamais je ne l’aurais cru si grand, si colosse. Je l’avais déjà vu dans le cabinet du patron de l’apprentissage, en joujou, haut comme le doigt et tout historié de petits échelons d’argent. On le posait sur les cartes, et il restait là, l’air pas plus fier que ses voisins. On l’allumait, semblait-il, comme on allume un bout de pipe. Seulement, nature, il était moins drôle. Sa grue d’arrimage et son fil de va-et-vient lui voilaient la face, pareille à une immense toile d’araignée. Juché sur une roche où on ne