Aller au contenu

Page:Rachilde - Le Démon de l’absurde, 1894.djvu/74

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

charnel, abandonné par ma mère, j’ai roulé d’abîme en abîme. J’ai tué, j’ai triché au jeu et j’ai menti. Vous m’avez laissé marcher jusqu’à vous pour mieux m’anéantir, je pense, et voici venue l’heure de la suprême chute, du péché sans rémission, du sacrilège ; je n’hésite pas, j’essaie de me justifier. N’êtes-vous pas plus coupable que moi, dites, Dieu dont la droite est trop immobile, et ne pouvez-vous pas m’épargner comme complice ou me détruire soudainement ?… Je vous rends mon paradis, sinon arrachez-moi le cœur de la poitrine. Il est temps de vous décider. Je suis peut-être le dernier des croyants. Et regardez derrière moi cette femme avec sa robe rouge, ses épaules pâles comme des flocons de neige fondant sur un feu vif. Il lui faut des bijoux, je n’en possède point. Quand elle agite sa petite main, Seigneur, vous qui voyez tout, vous avez bien dû vous en apercevoir, il semble que tout à coup le bout d’une aile d’ange vous pousse, et l’on va éperdûment jusqu’au