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Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/117

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première entrevue publique les deux anciens intimes ne se tutoyèrent pas, pour ne point gâter l’effet du discours. Il fut question de l’éternelle prospérité de la ferme-école et d’une récente loi sur les sucres. On présenta un vieux serviteur, M. Jacqueloir, qui demandait le bureau de tabac de Sarblay, le village voisin ; M. Gaufroi, comptable, qui rimait à ses heures des compliments ; puis on se mit à table pendant que la fanfare répandait des torrents d’harmonie aigrelette qui ne rafraîchissaient guère le temps.

Marguerite, debout à l’entrée de la tente officielle, avait eu une dernière imagination. Arrachant le tablier de sa femme de chambre, elle en avait ceint ses hanches, et une main dans une pochette, l’autre offrant le bouquet virginal, elle avait murmuré :

— Monsieur le Ministre, je suis votre dévouée servante.

Ce n’était pas très spirituel, mais c’était juste à l’unisson d’une réception rurale. Le Ministre, rendu à la jovialité de la campagne, embrassa paternellement la jeune sournoise en disant :

— Votre fille, mon cher Davenel, prouverait à elle seule que les belles fleurs ne peuvent acquérir plus d’éclat et de parfum qu’ici.