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Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/133

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réveiller. M. Davenel avait, lui, peur de se compromettre par des actes, fussent-ils excellents, et il estimait les mots, en prononçant de très sonores avec un ton de bonhomie joviale quand il éprouvait le besoin de garer sa responsabilité. Il se résumait, s’expliquait, définissait, détaillait ainsi qu’on se nettoie les mains avant dîner pour toucher du pain. Il gardait les mains de sa conscience toujours nettes, car il savait définir les situations les plus périlleuses, sinon les éviter. Il aimait beaucoup sa fille Marguerite, mais il ne la connaissait pas. Pour la bien connaître, il lui aurait fallu la suivre, l’étudier, la regarder souvent sans lui parler. Il y a des phrases qui sont des barrières infranchissables. Une fois posées entre un homme et une femme, on peut être sûr que ces deux êtres ne pourront jamais se joindre. Le directeur de Flachère supposait, à n’en pas douter, que sa fille désirait d’autant plus vivement se marier qu’elle affectait un grand dédain des adorateurs. Il ne voulait pas la condamner au célibat, mais il se réjouissait, lui, veuf, de prolonger une innocence féminine qui adoucirait les mœurs de sa maison, maintenant chez lui un bon renom d’ordre, de propreté, d’élégance. Marguerite était le défi rayonnant jeté