Aller au contenu

Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/14

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

solennel que donne la fortune justement et légalement acquise. Partout régnait une inexplicable beauté administrative.

Marguerite elle-même était belle, plus belle de toute la splendeur de son milieu. Fleur croissant sur des fleurs, s’étalant en étoile blanche, avec des coudes blancs sortant des manches du corsage immaculé, avec des petits doigts fuselés, en rayons blancs, se rosissant un peu sous les ongles comme des bouts de pétales qui toucheraient la lumière. Ses cheveux, pouff chatain bouffant haut sur les tempes, volumineux et légers, se cerclaient de petits peignes d’écaille ciselée mettant des reflets blonds clairs aux endroits sombres, un reflet de fortune, car elle était richement coiffée, ainsi que doit l’être toute jeune fille qui respecte son père… Sa chevelure lui prenait ses meilleurs soins, et le gardien-chef ne ratissait pas mieux les allées pour la venue d’un ministre qu’elle ne domptait les fameuses mèches rebelles dont on parle dans les livres, mèches bien encombrantes dans la vie ordinaire. Elle avait les yeux bleus, d’un beau bleu foncé comme le ciel du soir, des yeux humides sans raison, pareils aux corolles des belles de nuit, lesquelles se mouillent de joie rien