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Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/15

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qu’en s’ouvrant, et elle restait un peu pâle, quoique d’apparence assez robuste, parce que les jeunes filles qui attendent un mari pâlissent toujours en attendant. Ses dents étaient éblouissantes et ses lèvres, à peine carminées, se pinçaient, de temps en temps, pour dissimuler une envie de rire, Marguerite ayant le désir sage de garder son sérieux devant les profonds mystères de la vie. Elle aussi savait tout le prix d’une prudente administration des beautés naturelles. On peut chercher à en acquérir davantage, à la condition de conserver la ligne. La ligne, la tenue, tout est là, et telle fleur, tel sourire, qui dépassent les limites, doivent être arrêtés net ; ça romprait le charme de s’émanciper en brindilles inutiles ou en gaîtés intempestives. L’art de la femme est de se contenir sans éclater. L’art du pépiniériste est de crucifier avec méthode.

Oh ! les roses de la ferme-école de Flachère ! Merveille et délices ! Du haut de sa croisée, Marguerite leur jetait un salut approbateur, très gravement, car il est des heures où l’on communie avec toute la terre, on se sent sa créature de prédilection, sa reine ; il suffit pour cela de jouir d’une bonne santé, d’une bonne conscience, et d’espérer une grosse dot.