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Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/23

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Ici la jeune fille soupira, se moquant d’elle-même, un peu nerveuse, un peu soucieuse, intriguée, cependant, par un compotier couvert qu’elle découvrit, le dessert se servant à la russe chez eux.

— Peuh ! Des fraises en plombière, quand il y a déjà des cerises.

— Des cerises ? Sur le marché de Paris, mais ici nos Belle-Eugénie sont à peine mûres. Tout est en retard, cette année.

— Si on cherchait bien…

— Pas dans le verger nord ni dans le clos sud. Peut-être à la galerie neuve, du côté des nouveaux tuyaux. Là (il leva son doigt, doctoral), c’est du nanan. Les arbres sont chauffés aux racines, un courant merveilleux, des eaux tièdes, et grasses, et douces… Ah ! quel malheur que la même eau ne puisse nous pleuvoir dessus !

Marguerite fit la moue.

— Je n’y tiens pas, tu sais.

Elle réfléchit un moment, humant son potage.

— Et quand les cerises vont donner, personne ne pourra plus les voir. Ils les jetteront, à la cuisine, murmura-t-elle de mauvaise humeur.

La bonne arriva, portant un superbe poulet rôti, une bonne genre Watteau, en robe d’in-