Aller au contenu

Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/24

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

dienne rose, en tablier festonné, une fanchonnette de tulle voltigeant sur ses cheveux frisés.

Le père découpa le poulet, faisant des gestes de maître d’armes, car découper une bête morte éveille toujours un brin de férocité chez un brave homme, et détachant le « blanc » il le mit tout de suite sur l’assiette de sa fille.

— Ça, c’est pour Margot. Elle va le manger d’abord en attendant mieux. Elle boira ensuite de mon vieux Bourgogne, puisqu’elle a oublié son quinquina en regardant la belle nature. Elle n’aura jamais de couleurs, Margot, si elle ne se soigne pas.

— Des couleurs ? Je n’y tiens guère, tu sais, répondit-elle exactement du même ton qu’elle avait pris pour répondre au sujet des différentes qualités de leur eau.

— La santé perdue ne se retrouve jamais. Ta pauvre mère aussi s’en fichait, jadis, des couleurs, et elle est partie tout doucement, un peu chaque jour, en se plaignant, ce qui était un véritable tourment pour tout le monde. Il faut se soigner quand on se porte bien, c’est le meilleur des principes. (Il ajouta, inquiet, après une pause.) Tu devrais peut-être ne pas trop respirer l’air du soir, car, enfin, ce qui est bon pour