Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/142

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en sait toujours assez lorsqu’elle se rappelle l’heure de la prière. La reine Radegunde faisait de sa maison un lieu de délices parce que, à cause du martyre enduré pendant son existence conjugale, elle pouvait entrer vivante en Paradis. Pour moi, moins privilégiée, j’espère ne parvenir au ciel qu’à ma mort. Imitez ma modestie. Il n’est pire science que celle qui vous gonfle d’orgueil, mes filles !

Et, de son pas traînant de vieille mère cruellement blessée, l’abbesse gagna la chapelle de son monastère, où l’on entendait le bourdon d’un psaume.

Basine, pensive, la regardait s’effacer devant la jeune lumière de ses cheveux roux. Chrodielde, comme ayant fini de réciter une leçon, demanda l’avis de sa cousine.

— Que devons-nous faire maintenant ? questionna-t-elle, tandis que ses compagnes penchaient anxieusement la tête, tous les lis ondulant au vent d’orage.

Basine sourit.

— Nous assurer les clés de sa maison et lui laisser celles du Paradis puisqu’elle y tient. C’est une très sage personne qui saura se suffire de peu.