Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/279

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maître autel, masquant le tabernacle, fut mise en perce, tandis que les pauvres créatures si tendrement traitées par l’évêque Marovée : pigeons, poulets, canards, agnelets, porcelets, s’étalaient, mortes, rôties, au milieu de corbeilles de fruits secs, d’énormes fromages, y compris les produits les plus fins des pâtisseries et confiseries des monastères. Marconèfe, Helsuinthe, Famerolphe, Visigarde et Isia se multipliaient pour complaire aux porteurs de besaces dont elles avaient remplacé les sacs à malices en ce jour de brutaux corps à corps. Désormais en sûreté dans cette forteresse de la basilique, qui contenait des provisions pour un an de siège, elles allaient, venaient, plus légères de retrouver sous leurs pieds nus les dalles sacrées d’un temple. Elles avaient vu leur évêque céder son église à ces bandits. Elles honoreraient donc les bandits comme des évêques et jamais repas de prélats ne se montra plus somptueux. L’Aveugle-né levait les bras à la voûte, récitant les prières de la Sainte-Croix par habitude de remercier le ciel en oubliant ses propres péchés. Brodulphe-l’Adultère se réjouissait, quoique languissant de sa blessure, de goûter au vin d’un prince de l’église. Boson-le-Boucher, l’homme jaune, de robuste estomac, décidait d’avaler un mouton tout entier. Quant à Ragna,