Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/307

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Et Childéric-le-Saxon lui tendit sournoisement le gobelet de vin qu’il venait de se faire servir par un esclave, car l’ours avait chaud.

Mais Ragna, le Gaulois roux, rejeta ses cheveux en arrière, comme le lion qui renifle l’odeur du sang.

— Que signifie tes paroles, Basine ? gronda-t-il. As-tu l’intention d’insulter ta cousine en lui rappelant sa conduite envers moi ?

On s’entre-regardait gaiement, clignant de l’œil. Toutes ces brutes, esclaves encore hier, se sentaient aujourd’hui les égaux de leurs maîtresses ; si tous ne buvaient pas au même gobelet d’amour, ils savaient tous que la seule vierge de ce troupeau de servantes du Seigneur était la fille de Chilpéric, dont ils ignoraient, heureusement, la triste aventure chez son père. Par pitié pour son ami Ragna, Harog murmura :

— Il est naturel que des princesses vivant en compagnie des gens de guerre oublient leur naissance… par charité pour les plus braves. Les premiers princes ne sont pas nés autrement, je pense !

On applaudit en heurtant des armes contre les tombeaux.

— Voilà qui est bien répondu ! Harog a la prudence du serpent.