pure, distillée à travers pas mal de fanges.
Marguerite était bête, d’une pâleur de perle, ouvrait grands des yeux où l’on voyait se joindre, par l’orient de leur blanc uni aux noirceurs veloutées des prunelles, la mansuétude des veaux qu’on égorge et la folle, hystérie d’une femme presque toujours ivre. Elle était décolletée jusqu’à la taille, et un diamant, de la grosseur d’une noix, formait un lever de lune entre les monts neigeux de ses deux seins. Des voiles de crêpe, des voiles de veuve, s’enroulaient à ses cheveux noirs, dénoués, battant librement ses reins, comme une queue de cavale.
Avant minuit elle répétait les derniers mots de son entourage. Passé minuit elle jetait des cris d’argot plus que nature.
Les Brésiliens regardaient leurs bagues.
Le journaliste plaçait des phrases écrites la veille.
Le boursier racontait qu’il était sûr d’avoir croisé sa femme en Perrette, ce qui semblait lui faire plaisir parce que cela le posait en gros blasé, très littéraire.
— On soupera, heureusement, car on se rase, déclara-t-il pour terminer son anecdote conjugale.
— On se rase ! murmura Marguerite qui buvait un verre d’un affreux alcool où scintillaient les facettes de la glace pilée comme le mirage de tous ses diamants.
— Chez vous ? demanda le journaliste.
— Bien entendu. On mange trop mal partout, ces nuits grasses.