Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/157

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

peu ! — rejoignit Paul, qui, abandonnant Marguerite, se dirigeait vers le buffet.

— Mon grand, commença le jeune homme dont le rire cliquetait, pareil au bruit métallique de ses longs chapelets de pierres précieuses, il faut que je te raconte ça, c’est inouï… Elle est tombée dans le panneau, elle…

— Inutile, gronda Reutler, je suis très informé. J’ai même constaté que tous les espions ne venaient pas de Berlin !

Et, à son tour, il lui narra son aventure.

Paul, prenant son bras, se tordit.

— Mais je m’amuse ! s’écria-t-il. Tout s’embrouille à ravir ! Tu me produis l’effet d’un lion lâché au milieu d’un écheveau de soies ! Voilà que tu veux te battre pour Marguerite Florane, toi, l’austère !

— Toqué ! répliqua Reutler dont les épaules se haussèrent dédaigneusement ; je n’ai certes point à m’occuper de la pudeur de cette fille. Tu sais mieux que moi ce qu’il en faut penser.

— Alors ? questionna Paul railleur.

— Alors, je trouve le procédé ignoble !

— Ce que je m’en moque, du procédé. À leur place, me serais gêné, peut-être ! Voyons ! Tu n’enverras pas des témoins à ce pauvre homme sous le prétexte de ma pudeur à moi ? Ce serait trop grotesque. (Il pinça terriblement le bras de son aîné.) Tu oublies que je sais me servir d’une épée, mon cher.

Rappelé à la réalité de la situation par une assez violente douleur physique, Reutler sembla tomber des nues.