Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/187

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Mesdemoiselles, dit Juliette vexée, il est en pierre !

Et toutes reprirent le refrain.

— Enfin, c’est pas du jeu ! Paul a pourtant dit qu’il en fallait trois… déclara la plus effrontée. Si on allait chercher les ouvreuses !…

Brusquement, ce fut une irruption des plus jolis petits mots obscènes, un essaim de petits insectes malpropres parmi les ailes des charmants papillons.

On les défila tous, en rangs serrés.

Reutler posa sa main puissante sur le front de Juliette.

— Quand les enfants ne sont pas convenables, on les envoie dormir ! dit-il.

Appuyant ses deux pouces le long de ses tempes, il ajouta d’un ton un peu plus impérieux :

— Dormez, petite Juliette, dormez, jolie petite Juliette !

La petite Juliette oscilla une seconde, ses yeux se révulsèrent, clignèrent comme deux fleurettes qui se ferment à la disparition du soleil, et elle tomba en arrière. Les deux autres, effarées, se précipitèrent sur elle.

— Mais elle dort !

— Elle a l’air morte !

— Mais oui, elle dort ! je crois qu’il est vraiment l’heure du repos pour les gamines mal élevées ! conclut Reutler, très bonhomme.

Ce fut une panique épouvantable. Les deux petites bêtes encore éveillées se serrèrent l’une contre l’autre.

— Monsieur, dit la plus grande d’une pauvre