Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/295

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— Ah ! fit Reutler se prenant les tempes.

Puis, après le cri de l’oiseau, une note aiguë, une autre note discordante, des sons de flûte.

— Non ! pas cela ! c’est faux ! c’est écœurant ! Qui se permet, ici, chez moi, de me menacer de cette ignoble musique ?

Reutler gagna la terrasse et, abritant ses yeux, il explora la route de Rocheuse. Paul ondula comme une couleuvre le long de la balustrade et se pencha.

Les deux frères aperçurent, très loin encore, un curieux groupe : cinq petits hommes, à peine des pantins. Le premier jouait de la flûte, les quatre autres emboîtaient le pas et ils allaient militairement.

— Oh ! les jolis grotesques ! s’écria Paul battant des mains. On dirait des singes. Ce n’est pas une noce et ce n’est pas un enterrement. Cela tient des deux. Reutler, cela vient ici ! Non ! je ne céderais pas ma place pour une loge aux Folies-Nouvelles.

— Que tu es enfant, murmura Reutler ! Ne te penche pas ainsi dans le vide. Tu vas tomber. Tu me donnes le vertige. Descends, je t’en prie.

Paul, au lieu de descendre, pirouetta et laissa pendre ses jambes en dehors de la balustrade.

— Je t’affirme qu’ils viennent… chez toi, dit le cadet, moqueur.

— Chez nous !… rectifia l’aîné, un peu confus d’avoir parlé plusieurs fois au singulier.

Paul examinait les petits bonhommes et sifflotait, balançant les jambes à donner en effet le vertige.