Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/305

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La fille recula.

— Je m’en doutais ! Vous leur avez menti.

— Comme une femme, oui, ma chère, ça te scandalise ?

— Oh ! ce ne serait pas la première fois !

Elle était toute sombre, presque en deuil, et ses cheveux noirs, courts bouclés, lui donnaient une physionomie dure, étrangement ironique. Elle ne comprenait rien à ce jeune homme, cependant, elle le redoutait moins. Et puis, elle venait de frôler le danger de si près qu’elle se sentait aguerrie. Elle avait vu les gendarmes ! On avait voulu la faire se livrer, sans doute. Seulement lui, le véritable maître, ne tolérait pas cette nouvelle fantaisie.

Reutler rentra, fermant la porte à double tour.

Il bondit sur Paul-Éric, le saisit aux poignets et le dressa, debout, ne voyant rien. (Elle était si noire, dans leur ombre, la petite servante !)

— Expliquons-nous maintenant, gronda-t-il les lèvres blêmes ! Quand on m’insulte, moi, je n’ai pas l’habitude de me faire venger par mon fière. Tu le sais ! Alors que signifie cette mascarade et l’apparition de cette fille servant… ses ennemis… qui sont aussi les miens ! Sacredieu !… Non ! Tais-toi ! J’ai horreur du mensonge, j’ai horreur du vice et je ne trouve que cela dans l’atmosphère que je respire ici ! Je me moque de l’insulte quand elle vient d’irresponsables ou de pauvres gens mal élevés, mais je repousse toute défense de ta part comme une injure autrement sérieuse. Je ne suis pas ton complice, tu m’entends ? je ne permets pas à la créature détestable que tu es de protéger mon honneur en public. Je veux, j’exige qu’on respecte