Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/320

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tous !… toi qui l’a élevé dans tes bras, le slave qui l’a convoité, le groom qui entre chez lui malgré mes ordres, et tous ceux que je ne connais pas, que je ne verrai pas, qui viendront, le soir, plaisanter autour de son lit ! je vous tuerai tous ! La mort et le feu sont seuls purificateurs. Je devais l’enfermer dans une maison hermétique, une tour d’or vierge ou d’ivoire que j’aurais murée sur nous deux, où personne, entends-tu, n’aurait pu l’atteindre, pas même le soleil !… Jorgon ! Qu’est-ce que je dis ? Je ne sais pas ce que je dis et je te défends de m’écouter !

— Monsieur, vous ne dites rien… mais, fallait lui céder la petite servante tout de suite, dès le premier jour, si vous l’aimez sans jalousie ! À présent, il ne tient pas à vos restes, ce pauvre enfant ! Elle est laide, elle est sotte, par-dessus le marché. D’honnêtes Messieurs s’enflammer pour ce torchon, ça indignerait des soldats saouls, voilà ce que je pense ! Je me retire, Monsieur le baron, oui, je me retire…

— Va me chercher Marie ! cria Reutler se bouchant les oreilles.

Reutler se mit à saccager tous les rosiers, en attendant, et il éparpilla les fleurs aux quatre vents du ciel.

— Ma foi, il n’y a que les gestes ridicules qui soulagent les nerfs, décidément ! Au diable la lecture, les analyses scientifiques et les études sérieuses !

Il sema les dernières feuilles de roses, à poignées, sur le paon qui le regardait faire en s’épluchant l’aile.

Marie vint. Elle semblait inquiète.