Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/342

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Ce n’est même pas facile quand vous voulez bien ! soupira-t-il, et il se prit le pied, très satisfait de ce mot de vieillard. Voyons ? Est-ce que tu me trouves laid ! Ce serait crevant, dis ?

— Trop beau ! Beaucoup trop beau !

— Merci ! M’accable pas ! Tu rêves de poitrine velue, de cheveux noirs droit plantés, d’attitudes genre hercule Farnèse… Tu sais, Mica… Farnèse ? C’est le nom de famille de Monsieur Hercule, un roi qui régnait du temps où il n’existait que des imbéciles. Répète avec moi pour t’en souvenir. Que je serve au moins à meubler ton imagination.

Elle répéta, très sérieuse, car il daignait lui apprendre à lire :

— Farnèse, le nom de famille de Monsieur Hercule…

— Mica, interrompit confidentiellement le jeune homme, tu dis des bêtises. Hercule c’est un mot obscène, c’est infâme de répéter cela. Pourquoi n’as-tu pas deviné ?

— Je le pensais ! Vous êtes comme Célestin, vous ! Il faut que vous mettiez des mots d’ordures dans tout… Sale être, va !

Elle jeta son ouvrage, se dirigea vers la cheminée, s’y accouda pour pleurer. Voilà qu’il allait mélanger des choses impures au pur bonheur qu’elle avait de s’instruire et de se rapprocher ainsi du maître vénéré qui était, disait-on, toutes sciences. Paul rampa jusqu’à elle.

— Mica, balbutia-t-il lui enlaçant félinement les genoux, j’ai menti. Il n’y a qu’une vérité, c’est que je mens toujours. Je t’adore… là… me fais pas enrager. Les larmes sont contagieuses entre jolies