Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/343

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femmes. Embrasse-moi donc au lieu de pleurer. Une pauvre petite caresse, ça compte si peu… Je te ferai lire ! Je serai sage… Enfin, m’énerve pas ou je déchire ce portrait que tu regardes !

— Oh ! Monsieur Paul… celui de votre père !

— Ça m’est égal. Si tu crois que tu ne passerais pas sur le ventre de ta mère, toi, pour aller rejoindre ton amoureux ! Oui ou non, veux-tu m’embrasser ?

— Oui… comme du temps que vous portiez des jupes !

Elle se pencha, prête à la gifle ; Paul prit ses lèvres. Elle poussa un cri étouffé, chercha, au hasard, des ciseaux… qu’elle lui darda dans les yeux.

— Bon ! Le début de l’histoire de l’église ? Je connais la suite par cœur, Mica. Je vais serrer toutes les boîtes d’allumettes. Fichtre ! Tu es vraiment intraitable.

— Embrassez-moi ! je m’en moque ! Je tiens les ciseaux et j’avertirai Monsieur Reutler, par-dessus le marché. Nous verrons s’il sera content… lui qui a chassé votre groom à cause de moi !

Paul eut un mauvais sourire ;

— Monsieur Reutler est très jaloux, Mica !

— De qui ? s’exclama-t-elle les lèvres pâles,

— …Te flanquera dehors ou te conseillera de me céder, selon la brise soufflant à Rocheuse, ma chère !

— Vous vouliez que je m’en aille… et lui m’a fait monter des cuisines ici ! Non ! il ne me l’enverra pas. Il est le maître. Quand il vous laisse poser des croisées de six mille francs dans son salin, c’est encore pas vous qui les payez ?