Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/371

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était délicieux quand il scandalisait les filles de chambre et je l’imite très bien, tu sais ! Jolis, les seins de Mica, mais je ne les vois guère allaitant mes héritiers… Un jeune homme sage doit se garer de ses machinations ! Est-ce que mon histoire t’amuse, mon grand ?

— Où est le viol ? C’est toi qu’on voulait violer, ce semble ! interrompit l’aîné dont les poings se crispèrent convulsivement.

— Attends un peu ! justement, moi je ne voulais plus. C’est effrayant ce que je suis fantasque. Elle me reparle de ses cheveux, je dis que je n’y ai jamais tenu et que j’ignore, l’endroit qu’occupe ce noir trésor, j’ajoute, pour le dandysme : « Je leur préfère la queue de mon paon… au moins ils sont verts ! » Tout en désignant la dépouille de ce pauvre coco que j’ai eu la bêtise de laisser chez elle. Sacrebleu ! j’aurais dû me mordre la langue. Elle se met à rire et elle se coiffe, s’auréole de toutes les plumes. (Éric se leva, subitement enthousiasmé.) Ah ! mon cher ! C’était splendide et je ne te ferai pas grâce du tableau. Elle était debout, près de son lit, toute nue, aussi nue qu’une jeune Ève, et perverse comme une tentation enfantine ; elle ne faisait que jouer, sans malice, elle pleurait même un peu, de dépit, ses cheveux courts avaient disparu sous le duvet moiré du col de l’oiseau, qui lui formait un bandeau de reine sur le front, et derrière elle s’épanouissait la longue traîne étincelante, le feu d’artifice de toutes les pierreries vertes ! C’était bien coco méchant qui ressuscitait, plus méchant et plus superbe, avec des jambes moins fines mais plus blanches, et