Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/104

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que ma pauvre fille a dû souffrir de vos arrogances, tas de richards ! tas de vilains aristos ! Oh ! je voudrais que votre cassis me serve de poison… et crever tout de suite au coin de votre porte cochère, là, sur la borne. Des charités ! Malheur ! le père Tranet ne mendie pas, que je suppose… Il vous avait remorqué une caisse de bibelots, ses derniers rogatons du métier… Un petit tonneau en palissandre pour les liqueurs de ménage, un étui à cigares pour le gendre et des tas de machines prises dans la boutique à treize… Allons ! c’est bon, nous filons… gardez la caisse, nom d’un rabot !… Gardez tout… Moi, je garderai ma Louise… Mon chapeau, sacré tonnerre ! Où est mon chapeau ?

Il bousculait les meubles pour retrouver son haute forme, et Marie, la servante, désirant cacher ses pleurs sympathiques, fouillait sous la table.

Louis s’interposa, en lançant un coup d’œil impératif à sa mère.

— Père Tranet, vous avez mal compris… nous devions nous expliquer demain matin et voilà que vous vous montez comme une soupe au lait.

— Monsieur, s’écria Louise furieuse, vous êtes un hypocrite. Avec votre mère on n’a rien à répondre, mais si on s’expliquait avec vous, on ne démêlerait pas le faux du vrai. Laissez-nous partir, vous m’entendez, je ne vous aime plus depuis un quart d’heure. C’est lâche de se conduire ainsi, monsieur Bartau.

Louis reçut une commotion violente en pleine tendresse. Elle s’en allait, et, en bonne fille qu’elle était, elle le méprisait pour son