Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/118

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mari. Amboise ? Je ne sais pas !… bégaya la jeune femme ahurie.

— Docteur, il y a du louche dans toutes ces intrigues : Un père qui nous dégringole des nuages ; une fille qui demeure un mois sans demander pardon à son époux du tort qu’elle lui a causé en passant une nuit hors du logis conjugal… Docteur… aidez-moi de vos conseils… Je vous traite en ami plutôt qu’en médecin, déclara Caroline avançant la cave à liqueur et posant les verres sur une assiette.

Louise s’adossa au mur, elle ne s’expliquait plus pourquoi ce docteur était là. Elle revoyait dans un doux mirage, à travers la sombre perspective de la cour où le malheureux arbre centenaire allongeait ses branches ennuyées elle revoyait le splendide panorama du château royal, et, sur le sommet de la tour crénelée, un chasseur vêtu de velours et de soie, un gracieux chasseur portant la toque à plumes des grands seigneurs de jadis. Elle fut, subitement, si lasse, si découragée, qu’elle n’eut même pas la pensée de lutter contre un regret mystérieux. C’était bien bon, un mari amoureux, mais le prince charmant n’aurait-il pas été meilleur, surtout sans belle-mère et sans consultation de médecin ?… Presque toujours les femmes ont de ces brusques retours vers l’inconnu, quand elles sont fatiguées de certaines réalités brutales ; et quel esprit mon Dieu, il faut alors pour vous les ramener repentantes !

— Nous aimons à rêver ? interrogea le docteur faisant une moue significative. Je crois, madame Caroline, ajouta-t-il en baissant le ton, que ce pauvre Louis a peur d’être cocu.