Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/125

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les transformer en des situations ridicules. L’autre, le monsieur qui n’avait pas de nom de famille, mais qui, à la rigueur, pouvait en avoir mille, ou vous jeter, au moment le moins opportun, la carte de votre plus cher ami de collège. L’autre, ce héros de la légende conjugale ! L’autre, le désespoir, la honte !

— Louise, dit le jeune homme d’un ton altéré, ne se promène jamais sans moi, elle ne va ni à la messe, ni chez les curés. Elle fait sa prière, je crois, tout au long, mais elle ne m’ennuie pas avec des histoires d’offices extraordinaires. Quoique nous soyons modérés ici, nous ne sommes pas dévots, monsieur Rampon… d’ailleurs, je ne veux plus que ma femme me quitte un seul instant.

— Tu ne l’occuperas jamais assez sous le rapport de l’imagination.

— Pour ma part, je suis un positif, cela est vrai, docteur.

Et cependant il songeait que si c’est avoir de l’imagination que de s’inquiéter au sujet d’un autre, il en avait sûrement une dose colossale, lui.

— Donc, l’enfant est la garantie toute naturelle contre les écarts du cerveau… mon petit ami, affirma le docteur.

Louis s’impatientait. Ce gros homme de soixante ans, avec son nez très épais qui s’agitait comme la trompe d’un éléphant, lui apparaissait dans ses joies d’époux discret chaque fois qu’il avait envie d’être heureux et lui mettait de l’eau dans son vin avec une ténacité exaspérante.

— Monsieur Rampon, attendez un peu. Elle est si jeune, si frêle, si délicate.