Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/173

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pour l’eau de la pluie, baissait la tête, pâle comme un noyé.

— Ça ne peut être qu’un de mes ennemis, belle-maman, je vous assure, le fourneau était éteint, bien éteint. On aura jeté une allumette pour me faire de la peine.

— Et nous rôtir tous, n’est-ce pas, grand effronté ! libertin !

— Si j’avais su que ces souches valaient tant d’argent… madame Bartau.

— Il n’y a plus de madame Bartau, espèce de pétroleur, et vous sortirez ce soir même de chez moi… j’en ai assez des faillis et des incendiaires. Vous irez porter vos colles ailleurs, je vous le jure !

Comme le feu ne flambait plus, Louis ne vit rien de grave, il cria moins haut que sa mère, calma tout le monde, ferma les portes et fourra dehors le charcutier trop zélé.

— Mon fils, annonça maman Bartau, si vous ne chassez pas de votre magasin le père de mademoiselle Tranet… je partirai demain matin… et vous ne savez pas ce qui arrivera plus tard…

— Ma chère mère, qu’arrivera-t-il ?

— Je me remarierai, voilà !

Louis reçut ce choc terrible en levant les bras au ciel. Elle se remarierait. Au fait, pourquoi pas ? Le docteur Rampon n’avait jamais caché ses petits desseins. Il courtisait maman Bartau depuis son enfance, et il avait toujours regretté de n’avoir point eu de clientèle lors du mariage de Caroline avec le gros marchand de bois. Oui, elle pouvait se remarier, quitter la maison Bartau pour le cabinet Rampon, et lais-