Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/178

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cer que Louise dînerait chez son amie. Marcelle passa dans son cabinet de toilette afin de s’habiller, elle prit une robe de faille noire splendide qui enthousiasma la jeune femme. Louise aimait ce luxe déployé des soieries et des bijoux ; elle touchait ces étoffes avec un profond respect, elle apprenait le monde entre deux nouveaux costumes, les étudiant comme des livres de science, ne les enviant pas, car son cœur était trop plein d’autres désirs, mais leur faisant avouer toutes leurs plus secrètes élégances à son profit. Déjà, elle savait poser un nœud de velours sans qu’on eût à trop le remarquer, elle arrangeait ses chapeaux selon les meilleurs principes, attrapant des modes tout ce qui était simple et lui allait bien. Si elle n’avait rien compris aux extravagances de Mlle de Maupin, elle saisissait déjà la différence qui sépare la femme riche de l’artiste distinguée. Quelquefois, elle pensait tristement :

« Nous serions heureux pourtant… Louis et moi… à la condition de nous défaire de nos petites idées… Il suffirait que maman Bartau ne soit plus avare… Hélas !… »

À six heures, Marcelle Désambres monta dans une voiture qu’on était allé chercher sur le quai, elle salua d’un joyeux signe de tête Louise penchée le long des vitres du salon et elle partit.

Le cœur battant, la jeune femme errait du boudoir à la salle à manger : tarderait-il ? Le train n’arrivait qu’à sept heures ! Elle feuilleta plusieurs albums, tisonna les braises, examina les statuettes, les tableaux, joua avec le chat. C’était délicieux et terrible, cette attente dans ce palais dont on la laissait la reine. Elle n’a-