Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/183

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Elle se sentait brave et ne craignait plus les suppositions de son époux.

Il se décida à cacher les cerises.

— Assez… ma chérie, pour l’instant je vais te conduire dans notre nid. Il l’enleva, de ses bras nerveux, la coucha comme une enfant sur son épaule.

— Tu es très fort ! dit-elle toute tressaillante.

Dans le boudoir il ferma hermétiquement les portières, couvrit les lampes avec des écharpes de soie.

— Chérie, si vous divorciez un jour, voudriez-vous m’épouser ? lui demanda-t-il en s’agenouillant près d’elle.

— Oh ! certes, mon cher amoureux… mais vous ne m’aimeriez plus autant… les maris sont si vite dégoûtés de leurs pauvres femmes !

— Parce qu’ils ne savent pas les aimer… vois-tu. L’amour est comme un berceau : quand on ne le balance plus avec des précautions délicates, l’enfant s’éveille, il perd ses songes dorés, il est malade, il crie… je voudrais te bercer ainsi que font les mères, doucement, pour t’endormir dans un songe éternel, poétique et voluptueux, un songe tel que doivent en faire les anges. Tu crois aux anges, n’est-ce pas ?

— Oh ! oui, je crois à Dieu, je crois au paradis, mais je crois surtout en toi qui m’as donné un nouveau cœur.

Elle lui baisa le front, et il l’attira entre ses bras.

— Défais tes cheveux, ma reine, que je les admire à mon aise, ils sont si beaux !

Elle déroula sa longue natte, une mèche blonde s’accrocha aux myosotis perlés de diamants ; il fallut bien ôter le bijou, les azalées