Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/201

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Ils gagnèrent la promenade tous les deux. Tranet perfectionnait sa colle. Louis semblait l’écouter avec une religieuse attention.

— Une colle forte parfumée, criait Tranet, ce sera la gloire de l’ébénisterie française !…

Ils arrivèrent devant la grille dorée de la villa. Louis la poussa le cœur battant, ils errèrent de taillis en taillis, le long des pelouses, et atteignirent enfin le pavillon. Tranet s’affaissa sur son lit comme une bête, il se mit à souffler, le jeune homme referma sa porte soigneusement et se dirigea du côté de la terrasse. Il avait vu un rayon de lumière rose filtrer par la fameuse glace sans tain qui trouait le mur sur la Loire. Mme Désambres était rentrée. Il mesura la hauteur de la terrasse, il y avait deux mètres pour les espaliers garnis de lierre sec et deux mètres pour les colonnettes de marbres italiens.

— J’ai fait de la gymnastique pendant mes classes, se disait Louis un peu perplexe.

Il se débarrassa de son pardessus et de son chapeau, empoigna les lattes de l’espalier, s’accrocha contre les saillies de quelques pierres. Aux colonnettes, il respira.

— J’ai bien l’air d’un voleur ! murmura-t-il souriant et c’est une drôle de chance… Quand on vient pour opérer des restitutions…

Il enjamba la balustrade et sauta sur la terrasse. Le froid piquait ; les étoiles brillaient au ciel comme des pointes de verglas.

Une silhouette se dressait immobile dans la clarté d’une lampe. Marcelle Désambres, anxieuse, avait suivi toutes les péripéties de l’ascension, elle tenait un revolver à la main et ne paraissait nullement d’humeur à le bien