Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/202

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recevoir. Il s’arrêta, hésitant, la poitrine oppressée. Il voyait tout le boudoir, la Sapho teintée d’or, les meubles recouverts de velours vert, le piano s’enfonçant dans les étoffes japonaises bleues et argentées. La glace s’abaissa, Marcelle étendit son revolver.

— Vous, monsieur Bartau ? Ah ! je vais vous tuer comme un chien !

— Madame, dit très doucement le jeune homme, je savais que vous ne voudriez plus me recevoir, mais j’avais, malgré votre colère, quelque chose de pressé à vous dire… Madame, voici vos cinq mille francs.

Il déposa une liasse de billets de banque sur le rebord de sa croisée.

— Quelle folie ! bégaya Marcelle, clouée à sa place par la délicatesse de ce rustre.

— Je me suis juré que vous ne nous feriez pas l’aumône…

Marcelle jeta son arme dans les coussins de son divan.

— Et le père Tranet ? interrogea-t-elle.

— Il est au pavillon, il dort, c’est inutile de lui raconter cela. Je vous demande le secret.

— Vous n’êtes donc pas avare, monsieur Bartau ?

— Oh ! répondit le jeune homme, levant la tête, il n’y a pas besoin d’être prodigue pour payer ses dettes, et ce sont de terribles dettes que celles que l’on contracte vis-à-vis d’une femme.

— Monsieur Bartau, voulez-vous me faire l’honneur de repasser par ma porte, au lieu de vous sauver par cette terrasse.

— Volontiers, Madame, car je ne vous cache pas que je peux me rompre les os.