Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/204

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traire que vous pourriez, à la rigueur, me reprocher !

Il évitait de la regarder en face. Un frisson bizarre lui effleurait la chair. Louise ? Oh ! Louise ne l’aimait plus, elle était la tristesse après avoir été la gaieté. Louise s’éloignait de lui pour se plonger dans des sentimentaleries de blonde fatiguée de l’existence. Louise, navrée probablement d’être stérile, ne savait plus ni rire ni chanter. Quand il touchait ses lèvres, elles étaient trempées de larmes amères. Une révolution s’opérait à travers tout son corps vigoureux. Il avait bu, lui aussi, du champagne, mangé beaucoup de poulet rôti, et l’atmosphère de ce boudoir se saturait d’une pénétrante odeur de violettes.

— Madame, je suis un imbécile, vous me l’avez dit !

— Mettez-vous à genoux.

Il s’agenouilla, la tête perdue.

— Louis Bartau, je vous le répète, vous êtes un imbécile ! fit-elle en éclatant de rire, et elle le souffleta avec un gant, qui se trouvait là, oublié sur un fauteuil.

— Tiens ! le gant de mon petit frère, Marcel Carini ! ajouta-t-elle, sardonique, je ne me doutais pas que je vous frappais avec un gant d’homme !

— Ne recommencez pas, Madame ! dit-il d’une voix sourde.

— Et s’il me plaît ? riposta la fougueuse créature.

Avant qu’elle ait eu le temps de lever la main, le jeune homme bondit, lui arrachant le gant qu’il jeta dans le feu.

— Madame… vous me faites de la peine.