Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/203

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Marcelle hésita un instant, puis elle lui offrit la main. Il sauta dans le boudoir.

— Quel froid ! murmura-t-il. J’ai laissé mon pardessus et mon chapeau sur la pelouse.

— Étourdi !

Elle lui souriait, à présent, de son sourire affectueux. Toute la journée, durant la chasse, elle avait été nerveuse, tourmentée, troublée. On n’est pas dédaignée par un homme de vingt-sept ans sans que votre imagination ne rêve une jolie vengeance. Certes, elle haïssait les brutes, mais elle avait des perversités diaboliques, et, depuis quelques mois, la fièvre d’un désir irréalisable surexcitait ses sens. S’amuser un peu aux dépens de ce marchand de bois n’était qu’un moyen de plus pour ramener la maison Bartau à sa merci.

— Asseyez-vous, Monsieur, ce sont vos jolis copeaux qui brûlent, fit-elle très gracieuse.

— Non… je suis en retard. Louise m’attend.

Marcelle eut une audacieuse expression de défi.

— Vous mentez, dit-elle, Louise ne couche plus avec vous !

Louis chancela. Comment le devinait-elle ? Il avait eu tort de narguer les tentations. À peine était-il entré dans ce boudoir que le vertige le saisissait. D’un geste machinal, il comptait les billets de banque. Elle les lui arracha et les jeta par terre.

— Vous m’avez insultée, aujourd’hui, monsieur !

Ses doigts longs, fins comme des griffes, s’incrustèrent dans ses poignets, qu’elle tordit avec une force inouïe chez une femme.

— Moi, madame ? bégaya-t-il ; c’est le con-