Page:Rachilde - Nono, 1885.djvu/342

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
334
nono

Il fit un geste résigné et la rejoignit.

— Vous êtes content ? » demanda Renée d’un accent railleur à son mari quand ils roulèrent sur la route de Montpellier.

— Vous me voyez ravi ! répondit le duc en se mordant les poings de rage.

— Où allons-nous ? ajouta-t-il.

— Rue des Trois-Couvents… M. Névasson ! » jeta-t-elle au cocher stupéfait.

À neuf heures du soir, aller chez des plébéiens… la duchesse folle, un assassinat dans le château !

Largess fouetta le pur sang comme s’il se fût agi d’un simple cheval de trait, car décidément le blason de ses maîtres se ternissait !

Le duc fermait les paupières, Renée rattachait ses cheveux. Peut-être ne voulait-elle plus avoir l’air d’une folle. Bientôt, le coupé se ralentit sur le pavé.

— Nous sommes arrivés, je pense, dit-elle en touchant légèrement le bras de son mari.

— Soit », répondit celui-ci, et il s’enveloppa étroitement dans son pardessus de fourrures.

Renée n’avait qu’un châle de l’Inde, bien fin, bien souple, mais elle avait trop chaud.

— Largess, dit-elle d’un accent fort calme au groom qui ouvrait la portière, demandez à M. ou à Mme Névasson, l’adresse de leur fille. Ajoutez que nous avons besoin de médicaments spéciaux. »

Largess obéit. Le duc ne comprenait pas.

— Elle a épousé un pharmacien, autant que je m’en souvienne !… » expliqua Renée.