Page:Rachilde - Refaire l’amour, 1928.djvu/156

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poussé de mes pages d’album, ce qui attire une réplique d’un Monsieur grincheux, critique d’occasion, qui déclare que je n’ai jamais su dessiner.

Immédiatement, la bande qui eût été contre moi si on m’avait découvert un talent académique, tombe sur le Monsieur et, comme celui-ci n’a pas d’estomac, il perd pied, abandonne. Des camarades épars dans la salle se rallient, sifflent ou applaudissent ; la mêlée devient générale. On entend, dominant le vacarme, la voix pointue d’une dame que je ne connais pas :

— À bas la pornographie ! À bas la Jeunesse !

À laquelle voix pointue répond un cri rauque de phoque sortant de l’eau :

— Enlevez le pornographe, c’est un monstre qui déshonore la peinture et les femmes !

Intérieurement, je me tords, mais Bouchette a des larmes plein les yeux. Elle est debout, bien cadenassée dans son vieux manteau et sa petit étole de lapin rasé. Elle a visiblement envie de dire ou de crier quelque chose. Ses mains nerveuses se cramponnent au rebord de la loge. Elle est, devant cette foule rugissante, trépidante, comme la souris en face du chat.

Comment Néo Soldès a-t-il pu deviner