Page:Rachilde - Refaire l’amour, 1928.djvu/213

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autre portrait de vous ? Ce sera long. Oui, certainement, si cela me procure la joie de vous retenir à Paris, chère Madame.

— Moi, je n’ai pas le temps, mais, retouchez le même : conservez la tête qui me plaît parce qu’elle est mieux que la mienne d’aujourd’hui. Jamais vous ne pourrez réussir ce sourire-là, maintenant, puisque je ne vous aime plus. Et simplement habillez le corps. Si c’est faire la fille que vous demander ça… je me risque.

Je glisse à genoux devant elle en réunissant ses deux mains dans les miennes, ses deux mains froides.

— Ah ! pas cela ! Line, pas cela ! Demandez-moi tout ce que vous voudrez, tout, mais pas cette chose odieuse : refaire votre portrait en l’habillant ! Ne me condamnez pas à ce martyre… Je consens à vous perdre, à le perdre, puisque c’était l’enjeu de la bataille, je consens à voir pâlir mon dernier rayon de joie et à demeurer seul en plein crépuscule… je veux encore bien vous avoir retrouvée pour me bien pénétrer de cette vérité qu’il n’y a plus d’âme dans votre corps, c’est-à-dire d’amour pour moi, mais, non, pas ça, je ne veux pas travailler pour les sous-préfectures, je ne veux pas que vous vous sauviez de moi en emportant le joli portrait décent pour un public que j’ignore,