Mais vivre sans plaider, est-ce contentement ?
Des chicaneurs viendront nous manger jusqu’à l’âme,
Et nous ne dirons mot ! Mais, s’il vous plaît, madame,
Depuis quand plaidez-vous ?
Depuis trente ans, au plus.
Ce n’est pas trop.
Hélas !
Et quel âge avez-vous ? Vous avez bon visage.
Hé ! quelque soixante ans.
Pour plaider.
J’y vendrai ma chemise ; et je veux rien ou tout.
Madame, écoutez-moi. Voici ce qu’il faut faire.
Oui, monsieur, je vous crois comme mon propre père.
J’irais trouver mon juge…
Oh ! oui, monsieur, j’irai.
Me jeter à ses pieds…
Je l’ai bien résolu.
Mais daignez donc m’entendre.
Oui, vous prenez la chose ainsi qu’il la faut prendre.
Avez-vous dit, madame ?
Oui.
Trouver mon juge.
Hélas ! que ce monsieur est bon !
Si vous parlez toujours, il faut que je me taise.
Ah ! que vous m’obligez ! je ne me sens pas d’aise.
J’irais trouver mon juge, et lui dirais…
Oui.
Et lui dirais : Monsieur…
Oui, monsieur.
Liez-moi.
Monsieur, je ne veux point être liée.
À l’autre !
Je ne le serai point.
Quelle humeur est la vôtre ?
Non.
Vous ne savez pas, madame, où je viendrai.
Je plaiderai, monsieur, ou bien je ne pourrai.
Mais…
Mais je ne veux pas, monsieur, que l’on me lie…
Enfin, quand une femme en tête a sa folie…
Fou vous-même.
Madame !
Et pourquoi me lier ?
Madame…
Voyez-vous ! il se rend familier.
Mais, madame…
Veut donner des avis !
Madame !
Avec son âne !
Vous me poussez.
Bonhomme, allez gardez vos foins.
Vous m’excédez.