Page:Racine - Œuvres, t5, éd. Mesnard, 1865.djvu/431

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26. Des ornements que nous avons tâché d’y ajouter. — Travailler au dictionnaire d’une langue, est-ce y ajouter des ornements ? Tous ceux qui font des dictionnaires ne sont que des compilateurs plus ou moins exacts. On orne, on embellit une langue par des ouvrages en prose ou en vers, écrits avec un grand sens, un grand goût, une grande pureté, une grande exactitude, un grand choix de pensées et d’expressions. Mais on ne peut pas dire que ce soit y ajouter des ornements, que d’en recueillir, d’en définir les mots, et d’en fournir des exemples tirés du bon usage.

27. Vous répandez sur nous. — Ce nous, si on en juge par tous les autres qui sont dans l’Épître, et même par ceux qui sont dans la période précédente, doit s’entendre des académiciens : de sorte qu’à prendre droit par les termes, cela signifie que les étrangers sont assujettis aux coutumes de l’Académie dans tout ce que leurs lois leur ont pu laisser de libre. Mais quand on ôteroit l’équivoque de nous, qui est très-facile à ôter, il ne seroit peut-être pas aisé de réduire cette pensée à un sens juste et raisonnable ; car la langue d’un pays peut-elle raisonnablement se mettre au rang des choses que les lois laissent à la liberté des peuples de quitter comme il leur plaît ?

28. Quel empressement. — Tout ceci, quant au sens, ne me paroît pas assez lié, ni avec ce qui précède, ni avec ce qui suit.

29. C’est ce qui nous répond du succès. — Qu’est-ce que le succès d’un ouvrage ? Est-ce simplement de durer longtemps, et de passer à la postérité ? Si cela est, tous les mauvais ouvrages qui sont parvenus jusqu’à nous depuis deux mille ans, plus ou moins, ont eu un grand succès. Et que promet-on au Dictionnaire, quand on ne lui promet autre chose ? Mais si, par le succès d’un ouvrage, on entend, comme on le doit, le jugement avantageux qu’en fait le public après l’avoir examiné, comment peut-on dire que l’empressement que la postérité aura à recueillir les mémoires de la vie du Roi, est ce qui répond du succès du Dictionnaire ?

30. S’il arrive… qu’il ait le pouvoir de fixer la langue pour toujours, ce ne sera pas tant par nos soins, que parce que. — C’est dire : « S’il arrive qu’il ait le pouvoir de fixer la langue, ce ne sera pas lui qui la fixera. » La bonne logique auroit voulu qu’on eût dit : « S’il arrive que la langue françoise, telle qu’elle