Page:Racine - Britannicus 1670.djvu/7

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particulier & dans ſa famille. Et ils me diſpenſeront de leur rapporter tous les paſſages, qui pourroient bien aiſement leur prouver que je n’ay point de reparation à luy faire.

D’autres ont dit, au contraire que je l’avois fait trop bon. J’avouë que je ne m’étois pas formé l’idée d’un bon homme en la perſonne de Neron. Je l’ay toûjours regardé comme un monſtre. Mais c’eſt icy un monſtre naiſſant. Il n’a pas encore mis le feu à Rome. Il n’a pas tué ſa Mere, ſa Femme, ſes Gouverneurs. A cela prés il me ſemble qu’il luy échappe aſſez de cruautez, pour empêcher que perſonne ne le méconnoiſſe.

Quelques-uns ont pris l’intereſt de Narciſſe, & ſe ſont plaints que j’en euſſe fait un tres-méchant homme & le confident de Neron. Il ſuffit d’un paſſage pour leur répondre. Neron, dit Tacite, porta impatiemment la mort de Narciſſe, parce que cét Affranchy avoit une conformité merveilleuſe avec les vices du Prince encore cachez. Cujus abditis adhuc vitijs mirè congruebat.

Les autres ſe ſont ſcandaliſez que j’euſſe choiſi un homme auſſi jeune que Britannicus pour le Heros d’une Tragedie. Je leur ay declaré dans la Preface d’Andromaque les ſentimens d’Ariſtote ſur le Heros de la Tragedie,